Mais que fait D.ieu a Seir?

itrophe
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mar 26/03/2013 - 22:00

Hag sameah
Dans JUGES (שופטים)
5-4 Eternel quand tu sortais de Séïr, quand tu t'avanças de la région d'Edom .... Le Sïnaï tressaillit à l'aspect du Dieu d'Israel

Que faisait l'Eternet à Seïr, qui est cité 40 fois dans la Torah ? Séïr n'est il pas à Midiane, représenté dans la Torah par YTRO pour lequel une paracha entière y est consacrée ? Ce même Ytro n'est-il pas descendant d'Abraham père de Madiane ?
Toda

68839
En complément de ma question 68368, je vois que Seïr est cité souvent dans le houmash :
Genèse (berechit) 36:8 Et Esaü s’établit dans la montagne de Séir. Esaü est Edom
36:9 Et voici la postérité d’Esaü, père d’Edom, dans la montagne de Séir
36:19 Ce sont là les fils d’Esaü et ce sont là leurs chefs ; c’est Edom.
36:20 Voici les fils de Séïr, le Horien, qui habitaient le pays : Lotan, Schobal, Tsibéon, Ana,

Nathan Schwob
mar 21/05/2013 - 20:48

Je me permets d'unifier vos deux questions, d'autre part je ne vois pas très bien où vous voulez en venir avec Yitro, car si l'on peut effectivement assimiler Esaü-Edom avec Seïr, ce n'est pas le cas pour Midyan. Nous parlerons donc de ce que faisait D-ieu à Seïr.

Vous citez un verset du début du chant que Devora, la fameuse juge et prophétesse entonnât après la victoire sur Sissera et son armée de chars. Mais avant de comprendre ce que faisait D-ieu à Seïr, il faudrait expliquer pourquoi Devora avait besoin d'introduire son hymne en rappelant le Sinaï, Seïr et Edom, par un verset calqué sur l'introduction de Moché aux bénédictions d'adieu au peuple d'Israël (1).

Devora: "Eternel quand Tu sortis de Séïr, quand Tu t'avanças de la région d'Edom, la terre trembla, les cieux aussi se déversèrent, les nuages aussi se déversèrent en eau. Les montagnes ruisselèrent devant D-ieu, c'est comme le Sinaï au-devant du D-ieu d'Israël".
Moché: "L'Eternel apparu du Sinaï, a brillé de Seïr, pour eux. S'est révélé du mont de Paran, a quitté les saintes myriades, dans Sa droite une loi de feu, pour eux".

Les deux versets font allusion au don de la Thora, à l'apparition divine sur Séïr, et votre question redouble d'ampleur.

Revenons à la victoire de Devora et Barak aux pieds du Tavor, victoire inespérée due à un orage inattendu qui transformât les champs en boue et la rivière du Kishon en torrent dévastateur. C'est bien de cela dont parle Devora lorsqu'elle dit: "les cieux aussi se déversèrent, les nuages aussi se déversèrent en eau…". Un phénomène naturel? Non, un vrai miracle, un dévoilement de la Providence. Cette victoire apparemment naturelle n'est autre que l'expression de la présence divine, exactement au même titre que la révélation miraculeuse de D-ieu au Sinaï. Il suffit de savoir regarder, nous dit Devora.

Alors que faisait D-ieu à Seïr … et à Paran?

Moché, puis Devora, nous enseigne le Ramban (2), désirent rappeler trois étapes majeures de l'histoire de la présence divine au sein du peuple d'Israël, durant les quarante ans du désert: Sinaï, Paran et Seïr.

Tout d'abord la révélation du Sinaï et le don de la Thora, que nous fêtons à Chavouot. Mais D-ieu ne se contente pas de dévoiler Sa loi sur terre puis de s'en retourner en Sa céleste demeure… Il reste sur terre, et sa Présence, la Chekhina passe du mont Sinaï au Michkan (tabernacle) qui devient un Sinaï ambulant, à la seule différence que si le dévoilement de la Présence divine au Sinaï était grandiose, maintenant elle sera discrète.
Pour le peuple juif, cela signifie que nous ne sommes pas uniquement les gardiens de la Loi révélée mais aussi "les gardiens du palais divin sur terre", pour reprendre les termes du Ramban.

Paran, et son désert: c'est la première étape de la marche des Hébreux vers la terre d'Israël en quittant le Sinaï, et c'est aussi de ce désert que sont partis les explorateurs (3). Lorsque D-ieu et le peuple d'Israël entament leur marche commune dans le désert pour rentrer au plus vite en terre d'Israël, c'est une révolution historique pour l'humanité entière et un avantage certain pour le peuple juif. Mais, dit le Ramban, il n'y a pas de privilèges sans responsabilités. Car si d'une part, l'entrée de tout Israël dans le redoutable désert de Paran met en valeur la Providence divine qui "apparait du mont de Paran" pour subvenir à tous les besoins physiques de Son peuple, d'autre part ce même désert de Paran démontre que lorsque le peuple faute avec les explorateurs, la présence divine semble s'éloigner, "cacher Sa Face". En effet, pendant les trente-huit ans de désert le peuple d'Israël alla comme un paria de D-ieu et la Parole divine qui ne s'adressait à Moché que par le mérite de son peuple, devint silencieuse (4).
Paran signifient donc pour le peuple juif, que sa responsabilité est engagée, et influence le cours de l'histoire.

Quant à Seïr, dit le Ramban, c'est de là qu'a redémarrée l'histoire de la marche commune de D-ieu et d'Israël, avec la fin de l'exil de la parole et l'ordre de filer vers le nord pour entreprendre la conquête de la terre promise (5).
Seïr signifie pour le peuple juif que l'exil aura toujours une fin et que l'Alliance éternelle entre D-ieu et Israël reprendra toujours le dessus.

Si on regarde l'histoire sous cet angle, comme Devora, il est évident que les miracles "naturels" de la bataille du Tavor ne font que reprendre ceux du Sinaï.

Voilà donc une première explication.

Mais dans son commentaire sur les bénédictions de Moché (6), Rachi prend une autre direction en rapportant le fameux Midrach qui raconte qu'avant de proposer la Thora à Israël (au Sinaï), D-ieu la proposa aussi aux descendants de Yichmaël (à Paran) et de Essav (c'est ce que D-ieu faisait à Seïr), qui la refusèrent (7). Sinaï, Paran et Seïr viennent donc insister sur la différence qui existe entre ceux qui acceptent la Thora et ce qui s'en détachent. Ainsi, Devora de dire à ses contemporains (8): regardez ce qui vous est arrivé lorsque vous vous êtes détachés de la Thora, et le renversement de situation qui s'est produit lorsque vous êtes revenus à D-ieu de tout cœur.

Alors que faisait D-ieu à Seïr?

Il s'occupait de publier, dévoiler, faire connaitre à tous, la différence et le mérite de Son peuple, Israël, et Devora, reprenant l'image, proclamait: restez fidèles à vous-même.

(1) Juges §5,4-5: Devarim §33,2.
(2) Rabbi Moché ben Nah'man, (Nah'manide), commentaire sur la Thora. Devarim §33,2. Chemot §25 et introduction au livre de Bamidbar.
(3) Bamidbar §10,12 et §13,3.
(4) Voir aussi Rachi sur Devarim §2,16-17.
(5) Devarim §2,1-2 entre autres.
(6) Devarim §33,2.
(7) C'est peut-être cela que vous suggérez lorsque vous faites remarquer que Yitro est bien le seul descendant d'Abraham – mis à part les descendant de Yaakov – qui compris qu'il fallait dire oui à D-ieu et à la Thora.
(8) Rachi sur Choftim (Juges) §5,2 et 4.