Le hallel a Yom Haatsmaout

Anonyme (non vérifié)
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dim 30/03/2003 - 23:00

shalom lecoulam
certaines communautes recitent le hallel le jour de yom aatsmaout, quel est la source de cette coutume?
Est ce une halaha ou un minhag?
en ce qui concerne ceux qui ont pris l'habitude de faire la braha du halell
que dire du principe "safek braha lacoula", car il semble qu il y est un doute vu que cet pratique n est pas recu dans toutes les communautes?
Enfin nous savons qu un minhag qui nest pas accepter par le peuple doit etre annullee et ce minhag ne semble pas etre accepter par le Rov.

Rav Elyakim Simsovic
dim 27/04/2003 - 23:00

Réponse mise à jour
Dire le Hallel le jour de Yom Haatzmaout n'est pas une coutume mais une obligation positive, c'est-à-dire une halakha léma'assé dont je vais exposer le fondement.
Je ne suis pas sûr de comprendre l'expression "ceux qui ont pris l'habitude de faire la bérakha du Hallel" ?
Le fait que certaines communautés ne pratiquent pas une mitzva ne transforme pas l'obligation de celle-ci en safeq.
Je ne connais aucune règle concernant l'annulation d'un minhag qui n'est pas "accepté par le peuple" et sauf erreur je ne connais pas de statistiques précises permettant d'affirmer que cette mitzva ne soit pas acceptée par la majorité des communautés juives de par le monde et en Eretz Israël.

Je vais répondre à la question en précisant que je devrai être succinct bien que le sujet permettrait de longs développements (y compris pour répondre de manière argumentée aux diverses objections connues). J'ajoute une bibliographie éclectique (oui, c'est en hébreu, comme la Thora d'ailleurs...) tant hilkhatique que conceptuelle, sur les questions, problèmes et perspectives de l'époque contemporaine avec le renouveau national du peuple d'Israël sur sa Terre et les significations qu'un tel renouveau peut avoir à la lumière de nos sources traditionnelles et des enseignements de nos maîtres.
En français, vous pouvez lire les textes de rav Yéhouda Askénazi (Manitou) zatzal, Ki Mitzion II, Moadim, pp. 253-260 et 261-264.

Cela dit, commençons pas le commencement.

1. traité Pessahim 117a
"Rabbi yitzhaq rapporte l'enseignement de Chmouel : le cantique (de la mer rouge) c'est Moïse et Israël qui l'ont dit lorsqu'ils sont montés de la mer ; et ce Hallel, qui l'a dit ? les prophètes qui étaient parmi eux ont institué pour Israël d'avoir à le dire pour toute situation historique et pour toute détresse qui ne survienne - et lorsqu'ils en sont délivrés ils le disent à propos de leur délivrance."
Et Rachi précise : comme c'est le cas de Hanouca.
Nous apprenons de là que le Hallel de Hanouca n'est pas une "innovation" des Hasmonéens, mais l'application d'une règle instituée par les premiers prophètes et cette règle s'applique en toute situation où le peuple est sauvé d'une menace pesant sur lui.
A propos de l'expression (début du Cantique de la Mer) Vayomrou lémor, le midrach (Chémot Rabba 23) explique : "Ils ont dit de dire ; nous dirons à nos fils et aux fils de nos fils qu'ils disent devant Toi un chant quand Tu auras fait pour eux des miracles."

Certains postulent que l'obligation de dire le Hallel est une mitzva de la Thora (1) et certains disent que dans le cas d'un sauvetage, pour les générations ultérieures, la mitzva est rabbinique (2). Mais les uns et les autres sont d'accord sur le fait que dire le Hallel est une obligation.

2. Méguilat Taanit chap. 9
"Pour quelle raison ont-ils décidé de dire le Hallel complet (ligmor ett haHallel) ? C'est qu'à chaque fois que Haqadoch Baroukh Hou sauve Israël, [les Juifs] viennent à Lui avec louanges (Hallel) et en chantant, selon ce qui est dit (Ezra 3) : Ils reprirent par Hallel et Hodou laChem ki tov, etc."

3. Pour références analogues et complémentaires sur l'obligation de dire Hallel et la gravité de ne pas le dire, Pessiqta Rabbati s/Hanouca, Chéiltoth de rav Ahaï Gaon 26, traité Sanhédrin 94a.

Et pour conclure : le grand rabbinat d'Israël sous la direction des grands-rabbins Hay Ouziel et Isaac Herzog zikhronam livrakha a institué l'obligation de dire Hallel à Yom Haatzmaout (sans bérakha), décision reconduite par les grands rabbins Chlomo Goren zatzal et yibadel léhayyim aroukim le rav Ovadia Yossef chlita (avec bérakha*), leur autorité étant fondée sur le devoir d'écouter "le Juge de ton temps" (Deut. 17, 8 ; Roch Hachana 25b) et sur le principe d'une décision prise par un "Tribunal important" (Beth Din hachouv).

Indépendamment de la signification proprement religieuse de l'événement du rétablissement d'une souveraineté juive sur Eretz Israël en 1948 (partielle) et 1967 (totale), dans les deux cas tout le Yichouv, c'est-à-dire le Klal Yisrael (3), était sous la menace d'une destruction imminente et totale et il a été sauvé par la grâce de Dieu. Ne pas dire le Hallel avec bérakha dans ces conditions serait une marque d'ingratitude sans pareille.
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(1) Halakhot Guédolot, Assé 103-121, Loulav p. 352 de l'édition Hildsheimer ; Séfer Hayéréïm, § 242 ; Séfer Mitzvoth Qatane 146 ; Yessod Mora d'Abraham Ibn Ezra, 6ème portique, au nom de r. Bahya ; Zohar Haraqi'a du Rachbatz, 'assin 19 ; Maassé Nissim de rabbi Daniel Habavli, 1 ; Hatam Soffer Orah Hayyim 191, 208 Yoré Déa 233.
(2) Maïmonide, Séfer Hamitzvoth, Chorech 1 ; Nahmanide, notes, ibid. ; Natziv de Volozhyn s/Chéiltoth 26:1, selon qui l'obligation de la Thora porte seulement sur le moment où le miracle a eu lieu.
(3) Sur le fait que si la majorité écrasante des Juifs du monde habitent hors de la terre d'Israël et qu'il n'y a en Israël qu'un minyane de 10 personnes, ce sont ces 10 personnes qui constituent le Klal Israël, tous les autres n'étant qu'une masse d'individus, voir Maïmonide, Séfer Hamitzvoth, Mitzvat Qiddouch ha'Hodech.
* En ce qui concerne l'avis du rav Ovadia Yossef, la question de la bérakha est liée davantage à sa position générale qu'on ne dit pas la bérakha du Hallel à Roch Hodech et Hol Hamoed Pessah, position contestée pour les Séfaradim (voir à ce sujet l'étude détaillée du rav Eliahou Zini ainsi que les études du rav Cherki citées dans la bibliographie.)

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Orientation bibliographique (loin d'être exhaustive)

- 'Assé lékha rav, du rav Hayyim David Halévy, tome 1, questions sur la nature de l'Etat, la Guéoula et l'époque contemporaine ; tome 4, page 53 : l'histoire comme fondement de la foi en général et comme fondement de la foi dans le commencement de la Délivrance ; page 95 : rassemblement des exilés et Délivrance complète.
- Baroukh Mar'hiv Gad - KéLavi Chakhen, collectif, à la mémoire de Gad Ezra, Hachem yiqom damo, tombé pour la défense du Peuple et de sa Terre en sanctifiant le Nom. Hallel béyom Haatzmaout, harav Yaaqov Ariel, pp. 298-308 ; La signification religieuse de l'Etat d'Israël, rav Yéhouda Amital, pp. 309-315 ; A propos du Hallel le soir de Yom Haatzmaout (à l'entrée de la fête), rav Oury Cherki, pp. 353-375.
- Chééloth outchouvot BéOhala chel Thora, harav Yaaqov Ariel, vol. II, p.268 ; IV, p. 178.
- Chééloth outchouvot Chéilat Chélomo, harav Chlomo Aviner, VI, 70.
- Chééloth outchouvot Hayyim Chéal, du rav Hayyim Yossef David Azoulay ('Hida) II, 11.
- Chééloth outchouvot Qol Mévasser du rav Méchoullam Rothe, §21.
- 'Etz Erez, I, harav Eliahou Rahamim Zini (à propos de l'obligation de la bérakha du Hallel chez les séfaradim à Roch Hodech et Hol Hamoed Pessa'h.
- Hamédina Hayéhoudit, harav Yaaqov Mochè Bergman - Questions et réponses sur la nature de l'Etat d'Israël et les temps contemporains.
- Hassidour ha'hadach véhachalem létfiloth..., Morénou harav Tzvi Yéhouda Hacohen Kook zatzal, p. 114. Sur l'obligation de dire Hallel avec bérakha à Yom Haatzmaout.
- Hatéqoufa Haguédola, rav Ménahem Kacher zatzal - suivi de Qol Hator, l'enseignement du Gaon de Vilna sur les étapes de la Guéoula rapporté par ses disciples.
- Hatam Soffer s/Ora'h Hayyim 191.
- Pirqé Me'hqar Léyom Haatzmaout, Aaron Ahrend.
- Sefat Emet (rabbi de Gour) s/Hanouca.
- Sidour téfila Beit Méloukha (prières de Yom Haatzmaout et Yom Yérouchalayim) du rav Oury Cherki, pp. 175 à 215.
- Thorat Hamédina, harav Chélomo Goren, zatzal, Harav Harachi LéIsrael, p. 465.
- Tznif Méloukha, harav Mochè Tzvi Néria, en particulier pp. 112-120.
- Yech Choalim, harav Zalman Baroukh Mélamed, p. 20.
- Yisrael Bimédinato, receueil de textes du rav Mochè Tzvi Néria zatzal, rassemblés sous la direction du rav Réouven Haas, en particulier pp. 131-183.
- Zeh Hayom assa Hachem, harav Chaoul Yisraéli zatzal.