Conversation 13171 - Qui a institue Neila?

Anonyme
Mercredi 21 janvier 2004 - 23:00

Chalom lékoulam,
il y a une divergence dans la guémara de Béra'hot pour savoir qui a institué les Téphilot. S'il s'agit des Avot (Avraham Its'hak et Ya'acov) ou bien s'il s'agit d'une référence aux sacrifices dans le temple.
pour résumé : Cha'harit a était institué par Avraham (et en contre-partie du tamid du matin
Min'ha a était institué par Yits'hak (et en contre-partie du tamid de l'après midi)
'Arvit a été institué par Ya'acov (et en contre partie de la combustion des graisses)
Moussaf a été institué en contre-partie du korban Moussaf
Mais qui a institué la Téphila de Né'ila ? (si possible les références)
Merci d'avance Chabbat Chalom et Roch Hodech tov ouMévora'h

Nathan Schwob
Lundi 24 janvier 2005 - 23:00

Vous citez la Guemara Berachot 26b. Avant de répondre a la question, il faut comprendre ce que la Guemara a voulu dire.
"Tefilot Avot tiknoum": cela veut dire que nos Patriarches, dans leur quête permanente de D', ont signalées que certaines heures de la journée permettaient à chacun d'exprimer devant D' ses sentiments ou ce qui pèse sur son coeur. Avraham, Yitsh'ak et Yaacov ont chaqu'un prié à une heure de la journée qui reflétait leur vie personnelle et leur rôle historique. À nous aussi de suivre leur exemple et d'introduire notre vie, nos sentiments, le rôle historique de notre génération dans la prière.
(Voir Rabbin Elie Munk "Le monde des prières-Intoduction")
"Tefilot KENÉGÈD Temidim tiknoum": Cette phrase n'est pas uniquement technique, pour relier les heures légales des prières avec les heures des sacrifices journaliers au Beth Hamikdach. Tout d'abord les sacrifices journaliers s'appellent TEMIDIM, KORBAN HATAMID, à traduire sacrifice "permanent". Le rôle du Beth Hamikdach (La maison de la sainteté) n'est pas d'être un Temple oû l'on procède à des actes magico-religieux qui apaisent la divinité, comme l'ont condamné les prophètes, mais au contraire un endroit qui enseigne le chemin a suivre pour retrouver D'. La première condition c'est la permanence. La Présence de D' est permanente dans le monde, ce qui impose une recherche permanente. On ne peut pas servir D' seulement à certaines heures et L'oublier délibérément à d'autres, prier le Dimanche et faire se qu'on veut le reste de la semaine. Ce genre de comportement ressemble plus à une négation de D'.
Le Korban Tamid porte ce message et la prière, quand elle lui est relièe, porte elle aussi cette volonté de ressourcement de la relation à D', au même titre que la prière des Patriarches.
C'est dans ce cadre qu'il faut comprendre le mot KENÉGÈD: à traduire "en face de" et à comprendre soit comme "en correspondance, parallèlement à" mais aussi "en opposition à".
"Tefilot KENÉGÈD Temidim tiknoum": Les prières ont été instituées parallèlement aux sacrifices journaliers car elles jouent le même rôle, mais lorsque les sacrifices disparaissent après la destruction du Beth Hamikdach alors les prières ont été instituées en correspondance avec les sacrifices journaliers. Mais si les sacrifices sont compris de travers, alors les prières ont été instituées en opposition à une conception païenne de la relation de l'homme à D'.

Ceci dit passons à la prière de Neïla.
Le plus anciens témoignages écrits sur Neïla se trouvent dans la Michna Taanit (Ch.4,M.1). À trois "occasions" on rajoutait une quatrième/cinquième prière: aux jeûnes publiques (par exemple en période de sècheresse), à Yom Kippour et dans le cadre des prières rajoutées par les délégués du peuples (Maamad-Voir Michna 2) pour être présent au Beth Hamikdach au moments oû l'on apportait les sacrifices. La division du peuple en gardes a été organisée par Chemouel et David.
La prière de Neïla remonte donc à des temps très anciens comme prière "de la dernière chance" avant la clôture des portes (en hébreux: neïla), portes du Beth Hamikdach qui se fermaient au coucher du soleil après le Tamid de l'après midi, ou portes du ciel (Talmud Yerouchalmi Berachot 4,1; Taanit 4,1 et Rambam Lois sur la Prière Chap.1 Par.7).
Dans le Talmud Yerouchalmi (Taanit) Rav Lévy et Rabbi Meïr expliquent qu'en multipliant les prières on finit par être écouté. Curieusement Rav Lévy apporte comme preuve le verset suivant (Isaïe 1,15):
"...même si vous multipliez vos prières Je n'entends pas (dit D'), vos mains sont pleine de sang" (Lisez ce merveilleux passage en entier, versets 10-17, qui parle des sacrifices, des prières et de ce qu'il y a par derrière pour bien apprécier le clin d'oeil de Rav Lévy).
De là on apprend dit Rav Lévy, que lorsqu'on multiplie les prières, D' entend.
La priére de Neïla doit donc servir de résumé du travail moral intérieur auquel a été consacrée la journée de Yom Kippour. Son message doit nous accompagner à la sortie du Jour le plus saint lorsqu'on entreprend une nouvelle année qu'on voudrait mettre au service de D' même dans le train train quotidien (Rav S.R. Hirsch).

(Voir "Le monde des prières-Neïla" du Rav E. Munk en Hébreu ou en Français, "Netiv Bina" tome 5 Ch.11 Part.1 du Rav Yissachar Yaacobson).