Conversation 50575 - Donner oui, mais combien de fois?

mikaelv2
Mardi 19 janvier 2010 - 23:00

Chalom kvod haRabanim,
Une question concernant la tsedaka (mais pas seulement en fait). Lorsque je donne de l'argent a un mendiant, parfois celui-ci me sollicite pour une aide supplémentaire. Je ne sais jamais quoi faire. D'un cote je ne suis pas un distributeur automatique, et je crois que même si l'on est oblige d'aider son prochain, il me semble qu'on a le droit de choisir l'effort/argent qu'on y investit. D'un autre cote, je me sent coupable et je me dis que c'est peut être une vision minable du Hessed de dire que donner un franc nous dispense d'en donner deux.
D'accord on ne peut pas aider tout le monde tout le temps de toute nos forces, on en finirait plus... mais pourtant n'est ce pas aussi un ideal vers lequel on doit tendre? N'est-il pas trop facile de pretendre "Ah moi, je ne suis pas Avraham avinou" ?
En général, je règle mes dilemmes en me disant qu'avant de m'appliquer des midot hassidout, je devrai sans doute plus me concentrer sur ma techouva récente et de m'efforcer a faire les mitsvot 'asseh que je ne fais pas encore, et m'éloigner ... du reste. Et donc de ne pas culpabiliser pour des bêtises.
Comme je le disais plus haut, certaines choses restent parfois au niveau de "l'idéal a atteindre", qu'on repousse parfois très loin, histoire de bien mettre sa petite conscience a l'abri, et parfois seulement parce ce que c'est du bon sens.
Mais pourtant, la techouva ne vient-elle pas aussi nous apprendre que cet idéal est a portée de main? que cela ne dépend que d'un choix?

Alors finalement... Hessed fini ou Hessed infini? ou peut être aussi que je me pose trop de questions?

Merci pour votre temps.

Nathan Schwob
Vendredi 14 mai 2010 - 00:09

Si vous étiez infini comme D-ieu, vous pourriez octroyer une bonté (h'essed) infinie, et comme Lui, "donner sa pitance à toute créature, car sa bonté est infinie" (Psaume138-25 et Birkat hamazone). Mais voilà, par chance pour vous, vous n'êtes pas le Bon D-ieu, et votre devoir d'homme créé avec des limites, dans un monde limité est de trouver un équilibre adéquat entre la bonté et la rigueur.
Nos sages nous enseignent dans les Pirqué Avoth que nous n'avons pas l'obligation de mener notre tâche humaine à son terme mais nous ne pouvons pas pour autant nous en dispenser. Ils nous enseignent aussi que "Si je ne me soucie pas de moi même qui se souciera de moi mais quand je ne suis que pour moi même, que suis-je?".
Comme vous le voyez, la dialectique est posée, et la solution équilibrée se trouve dans un certain nombre de conseils et de lois que vous trouverez au cours de votre étude journalière de la Sidra (Péricope – Parachat Hachavoua) et de la Halakha, comme vous le remarquerez dans les quelques citations suivantes:

Dans le livre de Devarim (Deutéronome), Chap.15, vers.7 à 12 avec Rachi:
Verset 7: Quand il y aura parmi toi un pauvre, de tes frères ... tu n'endurciras pas ton cœur, et tu ne fermeras pas ta main, à ton frère le nécessiteux.
Rachi commente: (Traduction libre):
"Tu n'endurciras pas": il y a des gens qui sont dans le dilemme de donner ou de ne pas donner, c'est pourquoi la Thora nous encourage à opter pour la générosité. Il y a des gens qui tendent leur main puis la retirent, c'est pourquoi la Thora nous dit de ne pas nous rétracter.
Verset 8: Mais pour ouvrir tu lui ouvriras ta main, et tu lui prêteras…
Rachi commente:
"Pour ouvrir tu lui ouvriras": même plusieurs fois.
"Et tu lui prêteras": S'il ne veut pas de don, donne lui en prêt.

Kitsour Choulh'ane Aroukh, Chap.34, Halacha 4: on ne doit pas donner plus qu'un cinquiéme de son argent à la Tsedaka afin de ne pas devenir pauvre soi même et de devoir demander la Tsedaka des autres.

Alors les questions que vous posez sont de vraies questions au travers desquelles vous construisez votre personnalité et vos qualités (Midot) et par lesquelles vous remarquez avec raison qu'au delà de la lettre de la loi il faut aussi respecter son esprit en toute honnêteté. Or ce point là dépend vraiment de l'effort personnel investit à la recherche de cet équilibre (dont nous parlions plus haut) entre toutes les facettes du bien qui sont parfois contradictoires.

Voir aussi les nombreuses questions sur la Tsedaka sur le site, et la 35419.