Conversation 52834 - Mais d'ou Rachi tire-t-il cela?

moshe-cohen
Lundi 12 juillet 2010 - 23:00

Bonsoir,

Je me pose des questions sur les principes de base de l'étude de la guémara.

J'étudie depuis peu et j'ai déjà de bonnes bases en hébreu et en araméen, pour autant j'ai de grosses difficultés à comprendre une souguia de guérama.

Savoir traduire est trés loin de suffire à comprendre, Rashi ne donne pas toujours la réponse et lorsque je vois des versions anti-sèche (artscroll ou scheinsalt) je trouve l'explication d'une question à ralonge pour 3 mots.

A titre d'exemple je citerais la guemara Taanit, 3 premiers mots de la guemara sont :

- Tana Hékha Kaé (literalement d'ou vient l'enseignement ?)

Rashi nous éclaire certes en nous disans que la question de la mishna est sur le quand et qu'il semble que l'obligation de mentionné les forces de la pluie soit une loi dont l'obligation est déjà évidente pour le Tana.

Certes, mais d'ou Rashi le sait il ? et comment aurions nous pu comprendre la chose sans Rashi ? Sans les anti séches je trouve difficile de s'en sortir seul et on est à sec trés vite ! ! !

Avez vous des éléments qui puissent m'éclairer ou un sens dans l'étude qui permettrait d'avoir des bases pour mieux appréhender les sujets ?

Respectueusement.

Emmanuel Bloch
Vendredi 16 juillet 2010 - 08:44

Chalom,

Effectivement, il ne suffit pas de connaitre le sens des mots pour pouvoir etudier le Talmud. Il faut s'aider des commentaires, et en premier lieu celui de Rachi.

Mais meme Rachi a du apprendre tout cela une fois. Il etudia les enseignements de Rabbenou Gerchom Meor Hagolah, et ce dernier etudia aupres de ses maitres, et ainsi de suite. La chaine de la transmission remonte ainsi jusqu'aux grandes yeshivot de Babylonie et d'Israel, et plus haut encore jusqu'aux Sages du Talmud eux-memes, etc.

Cela etant dit, si Rachi n'a pas invente pas son commentaire mais l'a redige a partir des enseignements qu'il a lui-meme recus dans sa jeunesse, cela ne signifie encore pas que sa methode d'etude du Talmud soit la seule qui existe. Il y a eu, et il continue d'y avoir, plusieurs manieres d'etudier le Talmud. Certaines ont meme ete developpees relativement recemment. Le sens qui en resulte n'est pas toujours identique.

S'agissant de la longueur des explications, qui a effectivement tendance a augmenter au fil des generations, il me semble que l'on peut l'expliciter sur la base d'un certain nombre de facteurs.

a) tout d'abord, par des raisons techniques: l'invention de l'imprimerie, et les facilites qui existent de nos jours pour le stockage et la transmission des informations, font que nous sommes aujourd'hui beaucoup plus prets a gaspiller de l'encre. Imaginez le scribe du moyen-age, qui devait recopier de sa plume tout le Talmud - il y avait un reel gain, en temps et en argent, a avoir une explication concise.

b) Les traductions de Artscroll et Steinsalz visent a rendre le Talmud accessible meme aux Juifs qui n'ont recu aucune education religieuse a la base. Il faut donc rajouter beaucoup d'informations contextuelles, qui ne sont pas forcement necessaires a celui qui a toujours vecu dans le monde de l'etude, et qui nage comme un poisson dans l'ocean du Talmud.

c) Plus on s'eloigne d'une realite socio-culturelle donnee, plus il est difficile de la comprendre.

Imaginez un dialogue entre deux juifs religieux, le premier demandant a l'autre: "veux-tu une glace au chocolat", et le deuxieme repondant: "non, merci, j'ai mange de la viande il y a 2 heures".

Imaginez-vous maintenant la longueur des explications qu'il faudrait fournir a un parfait etranger, ignorant tout des lois de la cacheroute, avant qu'il puisse comprendre un dialogue pourtant parfaitement naturel pour tout juif pratiquant.

Ce phenomene existe aussi ici, et explique en partie la tendance a l'inflation dans la longueur des explications.

Ma question a moi, ce serait plutot : quelle taille auront les commentaires rediges pour expliquer Artscroll et Steinsalz aux futures generations ? :)

micass
Jeudi 15 juillet 2010 - 23:00

En rapport avec la question 52834 a laquelle vous avez apporté une très belle réponse, je préciserai que contrairement à une idée assez répandu (et très belle du reste) jamais Rabbenou Guershom n'a pu enseigner a Rachi puisqu'il est niftar 12 ans avant que Rachi ne naisse (et pas non plus tout de suite après).
Il est plus probable que ce soit son oncle maternel, en effet élève de la "yeshiva" de Meir Hagola, qui les lui ai enseigné quoique rien n'est moins sûr. Enfin personnellement moi qui ne suis ni autonome en ivrit et encore moins en hébreu, je pense que Rachi a souvent énoncé son avis en prenant appui sur des Midrach sélectionnés et sur ses connaissances personnelles. Sinon, il n'y aurait pas eu tous ces ingrats de Tossaphistes petits fils et élèves pour venir s'y opposer ;-)
Kol Touv, H'azak et Chabbat Chalom
(source: Rachi de Troyes, chez Albin Michel)

Emmanuel Bloch
Vendredi 16 juillet 2010 - 08:45

Chalom,

Merci de votre commentaire.

Vous avez raison de souligner que jamais Rashi n'etudia directement sous r. Gershom. Il etudia toutefois a la yeshiva de Mayence, fondee par r. Gershom et ou son enseignement etait perpetue. De plus, il considerait que tous les rabbanim achkenazes etaient, directement ou indirectement, ses disciples.