Conversation 71700 - Lois de Hol hamoed

Anonyme
Vendredi 20 septembre 2013 - 23:00

Chavoua Tov,
Etant donné les réponses "cas par cas" donnés sur le site concernant H'ol Hamoed j'aimerais connaitre les interdits de H'ol Hamoed
(Etant donne que H'ol Hamoed a commencé je me suis permets d'utiliser Cheela Express afin de m'adapter au plus vite)
Kol Touv

Rav Samuel Elikan
Vendredi 14 avril 2017 - 01:47

Shalom,

Vous nous demandez l'impossible... des livres entiers ont été écrits sur le sujet, et en tapant "hol hamoed" sur le moteur - ça marche, j'ai vérifié - on trouve toutes les réponses à cette question...

Je vais quand même tenter de marquer les grandes lignes.

- C'est un temps "sanctifié" (1), dans lequel il faut se réjouir et c'est pour cela qu'on va faire le moins de travaux possible (2).

- C'est pour cela qu'on revêtira de beaux vêtements, pour faire honneur à la fête (3).

- Cependant, il n'est pas nécessaire de manger du pain (3*), mais il est bon de manger de la viande et de boire du vin, afin de se réjouir (4).
Toute autre chose qui réjouit est d'ailleurs bienvenue, chacun selon ses goûts.

- Certains travaux sont permis, d'autres interdits (5).
Nos Sages ne nous listent pas explicitement lesquels sont permis ou interdits, hormis quelques travaux explicités à plusieurs endroits. Il s'ensuit une très grande "subjectivité" et un certain "flou halah'ique" - propres à l'essence même de "h'ol hamo'ed".
Je vous invite à lire à ce propos l'article "H'ol HaMo'ed : une imbrication de sainteté et d'ordinaire" d'Aaron Fraenckel (1928-1989), dans le livre "L'Echo de la Parole" (éd. Lichma, Paris, 2014), p. 81-93 qui donne une perspective profonde à cela.

La règle générale est donc que toute chose qui n'est pas nécessaire - il vaut mieux s'abstenir de le faire (6).

Malgré tout, il existe cinq règles (plutôt subjectives) qui permettent quand même de travailler à h'ol hamo'ed:

a - "Davar Ha'aved" - Tout travail qui ne serait pas fait pendant h'ol hamoed et qui engendrerait une perte conséquente (les règles explicites sont dans Sh. Ar. OH 537).

b - "Tzorkei HaMoe'd" - Toute chose qui est nécessaire pour la fête elle-même.

c - "Poel Ha'Osseh Melah'a Mipnei She'ein lo ma le'eh'ol" - Un travailleur qui fait son travail parce qu'il n'a pas de quoi manger, de quoi vivre ou qu'il risque de perdre sa parnassa, etc. a le droit de travailler.

d - "Tzorkei Rabbim" - Si le travail fait bénéficier de nombreuses personnes, il est parfois permis (il y a de nombreuses distinctions à ce sujet, comme le note le Sh. Ar. OH 544).

e - "Ma'asseh Hediot" - Un acte simple peut être parfois permis aussi, même si celui-ci est seulement effectué par et pour un même individu particulier.

- En outre, on a le droit, a priori de parler de business (7) et de fixer avec des ouvriers, etc. des travaux qui se feront après la fête (8).

- Cependant, sauf en cas de besoin comme précédemment explicité, on n'a pas le droit, a priori, de demander à un non-juif de travailler pour nous pendant la fête (9).

- Il n'y a pas d'interdit de "mouktze" durant h'ol hamoe'd (10).

- Faire des affaires, travailler, alors que ce n'est pas vraiment nécessaire, comme dit, n'est généralement pas autorisé (11).

- Il est permis de délier des vœux (hatarat nedarim), même lorsque ce n'est pas nécessaire (12).

- On a le droit de jouer de la musique (13).

- On a le droit de prélever les dîmes (troumot ouMa'asserot) à H'ol hamo'ed (14).

- A part ça, selon la majorité des décisionnaires on n'a pas le droit de se raser (15), de se couper les cheveux, les ongles, etc. sauf dans certains cas exceptionnels (16).

- Par contre, on a le droit de préparer de la nourriture en grande quantité même si on sait que cela va suffire pour après la fête aussi (17).

- On n'a pas le droit, a priori, de faire de lessives, sauf si on n'a pas d'autres habits, alors c'est permis (18).
Certains sont plus permissifs aujourd'hui, alors que nous avons des machines à laver électriques (18*), le décret de ne pas laver à h'ol hamo'ed concernerait alors les beaux habits qu'on ne met quasiment jamais, le lavage à sec, etc.

- On n'a pas le droit, a priori, de déménager (19), sauf cas de besoin, comme dit.

- On a le droit de faire tout ce qu'il faut pour les animaux, tout ce dont ils ont besoin (20) et cela comprend le fait de voyager et de réparer des ustensiles de voyage (comme un vélo, une voiture, etc.).

- On n'a pas le droit, a priori, d'écrire (de manière manuscrite) normalement (21).

- Et finalement, on n'a pas le droit de se marier (22).

Mais, et c'est très importants, tous ces interdits, ont des cas particuliers, permis, et ne sont pas "rigides".
Il suffit qu'une des cinq règles précédemment explicitées soit mise en cause pour permettre ces actions.

J'ai également indiqué les sources de chacun d'entre eux dans le Shoulh'an Arouh' en note et invite chacun à les étudier afin de comprendre chaque cas ainsi que ses exceptions (et il y en a beaucoup).

Cette réponse n'a rien de définitif - elle ne fait que donner les grandes lignes, après c'est à voir au cas par cas (et, comme dit, il y a déjà beaucoup de réponses sur le site).

Moadim LeSimh'a, H'aguim OuZmanim lessasson !

Sources :

(1) Rambam, hil. Yom-Tov 7,1; Avot 3,11 et TB Sanhédrin 99a avec comm. ad loc.; TB Pessah'im 118a et Rashbam, ad loc.; Pssikta Zoutreta Shemot, 34, lettre 18.

(2) TY Moed Katan chap. 2, hal. 3; Ra'avia et Kol Bo rapporté par le Mishna Broura à la fin du siman 530; Sefer HaH'inouh, comm. 325; Pele Yoetz, lettre h'et - s.v. H'ol hamoe'd.

(3) Meh'ilta sur Shemot 12:16 (il est intéressant de noter que le Shibolei HaLeket (siman 220) n'en a retenu que l'obligation de se réjouir par le fait de manger); Tania Rabbati, siman 51, rapporté par le Maguen Avraham OH 530, s.k. 1; Toss. sur Kareitot 7a s.v. Kr'ao et Arouh' LaNer, ad loc.; cependant, il semblerait que l'opinion du Rambam (hil. Yom-Tov, 6,16 - et resp. Rabbi Akiva Eiger, t. I, hashmatot au siman 1) ainsi que celle du Admour HaZaken (Sh. Ar. HaRav OH 529, 5) soit différente, le MB (Sha'ar HaTzioun, 530 s.k. 4) résout la contradiction en disant qu'il faut bien s'habiller mais pas autant que pour shabat ou les fêtes et c'est ainsi, il semblerait, qu'est l'usage (et non pas comme le Pri Megadim (Eshel Avraham s.k. 1) qui dit qu'il faut mettre les habits de Yom-Tov). cf. encore resp. Be'er Moshe VII, 3 s.k. 3. Il écrit encore que des gens faisant des travaux, de manière permise, les salissant devront mettre des blouses pouvant être salies, mais, à la différence des autres jours celles-ci devront être propres, histoire de marquer la différence. Je pense que c'est une grande "h'oumra" qui a priori n'était pas nécessaire, mais quiconque agit de la sorte en sera certainement récompensé.

(3*) Le Sh. Ar. tranche (dans les lois du Birkat HaMazon OH 188,7, selon le Smag et le Kol-Bo, rapportés dans le Beit Yossef, id.) que H'ol HaMoed est similaire, à ce niveau, à Rosh H'odesh: si on a oublié Ya'aleh veYavo dans le Birkat Hamazon et qu'on a déjà commencé la bénédiction "Hatov veHametiv" - on ne doit pas revenir en arrière, parce qu'il n'y a pas d'obligation de manger de pain durant ces jours là (cf. encore MB ad loc. s.k. 26). C'est également l'avis des Tossafot (Souka 27a, s.v. i'ba'ei) et de Rabbeinou Yerouh'am (Netiv H'et, chap. 2, 57c). Il est à noter que le Gaon de Vilna et après lui le Mishna Beroura (530, s.k. 1 et Sha'ar HaTzion s.k. 5) pensent que tout cela est dit a posteriori, mais a priori il faut manger du pain deux fois par jour durant h'ol hamoe'd. C'est également l'avis du Admour de Munkatsch zts"l (Nimoukei OH 530,1). Le Kaf Hah'ayim (Sofer - 530, s.k. 4) pense que si on mange du pain, il en faut deux - leh'em mishné - cependant dans les resp. Mishne Halah'ot (VIII, 197, 6) il est écrit que l'on n'a jamais vu une telle habitude et qu'il n'y a pas de raison d'agir de la sorte. Dans le resp. Shevet HaLevy (IV, 28) il est écrit qu'il est bon d'allumer des bougies ou au moins avoir de la lumière dans la maison durant h'ol hamoed pour respecter la fête. Mais ça aussi, je crois qu'on n'a jamais vu personne le faire...

(4) Orh'ot H'aim de Rabbeinou Aharon HaKohen de Lunel, hil. H'ol hamo'ed, siman 34; Sh. Ar. HaRav (Lyadi) OH 529,6; Shvilei David OH 530; resp. Be'er Moshe VII, 1; cf. encore Rambam, hil. Yom-Tov 6,17-18; Sh. Ar. OH 529,4 et MB ad loc s.k. 16.

(5) TB H'aguiga 18a et comm.

(6) Mor OuKtzia, siman 545 relativement à l'impression de livres à H'ol Hamoed; H'ayei Adam, Klal 110, se'if 11 relativement au fait de nouer et défaire des nœuds et c'est également l'avis du Ma'adnei Shabat (hil. H'ol hamoed). Il est intéressent que ces deux derniers ont fait une liste des 39 travaux de shabat - et l'ont comparé de manière systématique avec h'ol hamoed. Si vous voulez une liste précise des choses permises et interdites, allez voir là-bas.

(7) resp. Yah'in OuBoaz I, 117.

(8) Sh. Ar. OH 543,3.

(9) id.

(10) Toss. sur Shabat 22a, s.v. Souka tania; resp. Rosh 24,9; Tour OH 638 et MB 638, s.k. 14; Meiri sur Moed Katan 13b et 18b; Darkei Moshe OH 544,2.

(11) cf. Sh. Ar OH 539 et comm. pour tous les détails.

(12) Darkei Moshe OH 531,1 qui se base sur le Mordeh'i.

(13) cf. Sh. Ar OH 534 et comm.

(14) Toss. sur Avoda Zara 59a s.v. betzar.

(15) Bien que certains (cf. resp. Olat Shemouel OH 75), comme le Noda BiYehouda (resp. OH 13) autorisent.
J'ai d'ailleurs entendu du Rav Aharon Lichtenstein que quiconque ayant l'habitude de se raser qui ne se rase pas durant H'ol hamoed et par conséquent a l'air "en mauvais état", "pas propre", etc. est considéré comme "souillant" les fêtes, ainsi que le dit Rabbi Elazar HaModaï (Avot, préc. cit.) :
« Quiconque profane les choses saintes, dédaigne les fêtes religieuses... un tel homme, même s’il est érudit en Thora et accomplit de bonnes actions, n’aura point part au monde futur ».

C'est également l'avis de mon maître le Rav Rabinovitch que quiconque se rase tous les jours doit aussi se raser à H'ol hamoed (resp. Siah' Nah'oum, 30, p. 97-99).

Cf. encore resp. Iggrot Moshe OH 163 qui dit que ça dépend de l'usage de la contrée dans laquelle on vit.

Il est à noter que le H'atam Sofer (resp. OH 154) s'opposa farouchement au rasage durant H'ol hamo'ed.
Je pense qu'on pourrait ramener une preuve des propos du Ritva sur Moed Katan 13b pour permettre.
Quoi qu'il en soit si on n'a pas l'habitude de se raser tous les jours, il semblerait qu'il vaille mieux ne pas se raser durant H'ol hamoed.

(16) comme indiqué dans le Sh. Ar. OH 531 et comm.

(17) Id. 533 et comm. ; c'est cependant permis pour les habits d'enfants. On a aussi le droit de nettoyer la maison.

(18) Id. 534 et comm.
(18*) cf. resp. Pélé Yo'etz (Stollman), §29, p. 78-83 et c'est également l'avis de mon maître le Rav N.E. Rabinovitch.

(19) Id. 535 et comm.

(20) Id. 536 et comm.

(21) Id. 545 et comm.

(22) Id. 546 et comm.