Conversation 73373 - Ouvrir la porte... Mais pourquoi?!

sarahbe
Mercredi 15 janvier 2014 - 23:00

Shalom
J`aimerais vous poser une question a propos du minhag que nous avons d'ouvrir la porte de notre maison (avant la lecture de "Shefoh" pour les Ashkenazim) lors du seder de Pessah. Quelle est l'origine de ce minhag? A quelle periode apparait-il pour la premiere fois et quelle est sa signification?
En vous remerciant

Emmanuel Bloch
Dimanche 19 janvier 2014 - 19:42

Chalom,

Les coutumes d'ouvrir la porte et de reciter "Chefo'h" (Tehillim 89:6-7) n'etaient pas liees l'une a l'autre au depart.

Pour l'ouverture de la porte, la premiere mention que l'on en retrouve remonte au 9eme siecle, dans les ecrits du Sage babylonien rav Matityahou Gaon (Otsar HaGeonim Pessahim p. 112), qui note qu'il existait une coutume ancestrale de laisser la porte ouverte pendant le Seder, afin que les pauvres puissent librement entrer et participer; mais il note egalement que, deja a son epoque, cette antique coutume n'est plus appliquee, car l'habitude avait ete prise de faire des dons de nourriture aux necessiteux avant la fete.

A la fin du 12eme siecle, R. Elazar haRokeah lie l'habitude, suivie dans sa communaute, de laisser la porte ouverte, a l'attente du prophete Elie qui viendra delivrer les Juifs de l'Exil pendant la fete de Pessah.

L'autre coutume, celle de reciter "Chefo'h 'Hamatekha", n'est pas mentionnee dans le Talmud, ni chez les Geonim, et elle est absente de la plupart des haggadot qui nous restent du temps des Richonim. La premiere mention qui en est faite se trouve dans les commentaires des Tossafot Berakhot 14a.

On la retrouve ensuite de plus en plus souvent, avec des changements lithurgiques importants, meme si les 2 premiers versets demeurent toujours.

Au 16eme siecle, R. Moshe Isserles lie les deux coutumes entre elles (Choulhan Aroukh Orah Hayyim 480:1) - on laisse la porte ouverte en affirmant que Dieu vengera les souffrances subies par les Juifs, et en s'appuyant pour la securite sur le fait que Pessah est un "leil chimourim" - une nuit de garde ou rien de mal ne peut arriver aux juifs.

Le maintien de la porte ouverte pendant toute la duree du Seder fut neanmoins abandonnee a cause du danger, elle ne reste qu'a l'etat symbolique, a la fin du Seder, pour ce qui concerne les communautes ashkenazes.

Au 19eme et au 20eme siecle, certains dirigeants spirituels, deranges par le contenu anti-non-Juifs de ce texte (qui etait comprehensible au Moyen Age, mais choquait desormais), voulurent proposer des textes alternatifs, mais ceux-ci ne furent jamais vraiment adoptes.