Conversation 84602 - Mesuré sur mesure

guedjb
Mardi 5 novembre 2019 - 12:45

Chalom,

D'où vient le principe "mesure contre mesure" dans la Torah?

Qu'est ce qui prouve qu'Hachem se conduit comme cela? Ou qu'Hachem nous juge comment nous jugeons notre prochain?

 

Nathan Schwob
Vendredi 6 décembre 2019 - 13:05

Le principe de mida keneged mida est tellement présent et sous-jacent dans la Thora écrite et orale qu'on a parfois du mal à retrouver ses sources les plus claires.

Ce principe exprime l'équité de la justice Divine, qui fixe la punition des fautes proportionnellement à leur gravité et de même pour les bonnes actions, la récompense est  proportionnelle à leur grandeur.

 

Nos sages nous enseignent dans le Talmud (Sanhedrin 90a):

 

Rabbi Chemouël Bar Nah'mani enseigne au nom de Rabbi Yonathan: D’où savons-nous que tout ce que D-ieu mesure (pour le monde) est mesure pour mesure? De la punition du ministre du roi Yoram d'Israël, qui n'a pas cru qu'il y aurait la fin du siège de Samarie et de la nourriture à profusion et donc il n'en a pas profité (Rois II 7,1-2 et 17-20).

 

Un autre texte du Talmud Yerouchalmi (Sota 1,7) trouve la source chez le Prophète Isaïe (27-8): On a enseigné au nom de Rabbi Meir: Avec la mesure qu'un homme utilise pour mesurer D-ieu lui mesure, d’où le savons-nous? Du verset: "C'est avec mesure que Tu as punis ce peuple…" Le mot est redoublé (Besasea - comme si on disait en français une mesusure"  pour nous dire que la mesure est dans la mesure. (Voir la suite du texte et aussi Talmud Bavli Sanhedrin 100a pour l'élargissement du principe et de son application).

 

Le Talmud Bavli (Sota 11a) et le Midrach Raba (Chemot 22) nous fournissent eux une source claire dans la Thora, dans les paroles de Yitro: Rabbi Eléazar enseigne: Comment comprendre que pour dire que les Égyptien avaient "prémédité" leur méchanceté contre Israël, Yitro a utilisé le mot "concocter"? Parce qu'il a voulu dire que dans cette même marmite dans laquelle ils ont "cuit" Israël, ils ont été cuits. Ils ont noyés les bébés males hébreux et ont été eux même noyés. Et c'est pour cela que Yitro a déclaré: "Je sais maintenant que l'Éternel est plus grand que tous les dieux". C'est en constatant que les hommes ne sont pas soumis à l'arbitraire des dieux auxquels croyaient ses contemporains, mais au contraire, que les hommes sont jugés équitablement, en fonction de leurs actions, et que c'est cela le message central des apparitions divine de la sortie d'Égypte, que Yitro a rejoint les rangs du peuple d'Israël.  (Voir aussi Rachi Chemot 18,11).

 

Revenons au second texte cité. Rabbi Meir énonce le principe Mida KeNegued Mida différemment. C'est que ce principe que nous avons compris pour la justice divine, s'applique aussi à la providence divine. Nous retrouvons cette idée dans Yalkout Shimeoni (Tehilim 875 au nom du Midrach Choh'ar Tov):

D-ieu répond à Israël par le nom utilisé pour l'invoquer. Ils l'ont invoqué par "El Chaday" – "El Chaday" te bénira (Beréchit 28,3) - et  il leur répond par "El Chaday" – "Je suis El Chaday fructifie et multiplie (Beréchit 35,11)".

Le Midrach continue sur ce mode avec les autres noms de D-ieu: "Élohim", "Hachem", "Ya", puis conclut:

C'est ce que Moché a dit à Israël (Devarim 4,7): "En effet, qui est un grand peuple qui a un dieu proche de lui  comme l'Éternel notre D-ieu en tout ce que nous l'interpelons?" (Comprenez de la manière ou nous nous adressons à Lui). Les différents noms divins caractérisent la manière de percevoir la Providence, qui répond ensuite sur le même mode. Il s'ensuit donc que c'est l'homme lui-même qui choisit la nature de sa relation avec D-ieu, par son niveau de moralité et par ce qu'il est prêt à investir de sa personnalité.