Signification de 'kadosh'

Anonyme (non vérifié)
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dim 19/10/2003 - 23:00

Shalom rabanim,
Je retrouve le mot KADOSH très souvent sur votre site. Puis-je connaître la signification de ce mot et ce qu'il représente dans la religion ou la tradition israëlite?
En tout cas, bravo pour ce site et merci pour la clarté, la rapidité et la gentillesse de vos réponses, j'étudie l'hébreu et j'estime que la connaissance de la pensée (si tant est qu'on puisse la connaître) juive fait partie intégrante de la culture.
Todah rabah véshalom lécoulam

Rav Elyakim Simsovic
sam 08/11/2003 - 23:00

Le mot qadosh (que je préfère translittérer avec un "q" puisqu'il s'agit d'un "qof" à l'initiale et non d'un "kaf") est généralement traduit par l'adjectif "saint", le substantif, "qédoucha" étant traduit par sainteté.
Selon le contexte dans lequel il est employé, le terme peut avoir diverses significations, appartenant toutes néanmoins à un champ sémantique qu'il est possible de délimiter.
Appliqué à Celui qui est Dieu le mot désigne Son absolue transcendance. Le fait qu'aucune des réalités mondaines ne saurait en aucune façon ni lui être comparée ni moins encore le représenter.
Entendue comme commandement pour l'homme, comme en Lévitique 19:1 : "Vous serez saints", l'exigence de sainteté a pour condition l'éloignement de tout vice. Elle désigne une attitude de la conscience visant à l'unification de toutes les valeurs. Comme le dit notre maître, le rav Yéhouda Léon Askénazi (Manitou) de vénérée mémoire : "La sainteté se trouve en effet dans la convergence de vertus habituellement irrיductibles."

L'unification des valeurs en l'homme est la dimension morale de la croyance métaphysique en un Dieu Un. Vous serez saints dans votre dimension humaine comme Je suis saint dans la dimension divine. C'est ainsi que la sainteté humaine et la sainteté divine peuvent se rencontrer en ce lieu privilégié que la Thora appelle Qodech HaQodachim - traduit par Saint des saints - où le superlatif de la sainteté ne désigne pas seulement ce qui est plus saint que tout mais la sainteté résultant de la convergence de toutes les saintetés à leur paroxysme : la sainteté du lieu, intériorité ultime du Temple de Jérusalem, la sainteté du temps, Yom Kippour, le plus saint de tous les jours, la sainteté du plus saint des hommes, le Cohen Gadol, revêtu des habits les plus saints, ensemble de saintetés réunies devant Celui qui est Saint.

C'est ainsi que deux passages des prières, l'une trois fois quotidienne et l'autre en qui s'achèvent et convergent toutes les prières de la semaine se font écho :
Tu es saint et Ton Nom est saint et ceux-là seuls qui sont saints peuvent Te louer chaque jour.
Tu es Un et Ton Nom est Un et qui est comme Ton peuple Israël, peuple Un sur sa Terre.

Cette analyse trop succincte me paraît devoir s'achever par le rappel de la signification messianique de la profession de foi du judaïsme, le fameux "Écoute ! Israël..." Je l'emprunterai à un texte de Manitou publié dans le tome 1 de Ki Mitsion, notes sur la paracha de la semaine :

« ... Il nous faut donc admettre que malgré notre familiarité avec le principe de l'unité de Ce-Lui qui est Dieu, familiarité qui nous vient d'un très long temps d'éducation biblique, la Thora sait qu'en fait ce principe n'est pas co-naturel à l'expérience humaine. Il était nécessaire d'exhorter Israël lui-même à ne pas oublier l'expérience qu'il en a eue par évidence directe, expérience historique dont il a été l'objet et le témoin et pas seulement expérience intellectuelle de réflexion ou de raisonnement. C'est que le monothéisme de l'unité, bien qu'impliquant l'unicité, la dépasse infiniment. Que Dieu soit unique, seul à être ce qu'Il est, peut devenir une évidence de l'intelligence, après un long effort d'ascèse spirituelle. Mais le principe de l'unité des valeurs reste une connaissance reliée à la foi. Tout se passe comme si, en effet, notre monde était apparemment soumis à des absolus contradictoires et donc à un irrémédiable conflit de valeurs. Les mythes païens montraient cela dans « la guerre des dieux ». Non seulement le bien et le mal, le vrai et le faux, la vie et la mort… toutes les valeurs, selon l'expérience humaine, se contrarient : ce qui est utile n'est pas forcément le bien ; ce qui est le bien n'est pas forcément rationnel ; ce qui est beau n'est pas forcément vrai ; ce qui est juste n'est pas forcément beau, et ainsi à l'infini. La coïncidence des valeurs, la justesse de leur unité est littéralement miraculeuse, car toujours secrète, cachée et « irreprésentable ». L'insensé a dit en son coeur : il n'y a point de Dieu. « En son coeur », c'est-à-dire à cause de ce qui se passe en son coeur. D'où la forme impérative que prend cette exhortation : « Écoute Israël ! », signifie d'abord : « Prends garde Israël ! »
Le commentaire que donne Rachi de notre verset lui assigne un prolongement
considérable. Expliquant plus particulièrement le terme « notre Dieu », il enseigne :
Celui que nous avons déjà été appelés à reconnaître comme tel, déjà notre Dieu dès maintenant, est destiné à être reconnu par toutes les familles de la terre. Selon les versets suivants : Car alors Je déverserai sur les peuples une langue épurée afin qu'ils invoquent tous le nom de Hachem. (Sophonie III, 9)
En ce jour-là sera Hachem Un et Son nom Un. (Zacharie XIV, 9)

Comme si les événements de l'histoire d'Israël – qui firent de lui le peuple de la
prophétie monothéiste – étaient une préfiguration de la promotion de l'universel
humain aux mêmes certitudes quant à l'unité qui se cache au-delà du chaos des absolus, et donnent en cela, à toute personne appelée à les entendre, la connaissance et la certitude du salut. »

Avec nos remerciements pour vos appréciations et l'espoir de les mériter toujours.

Elyakim P. Simsovic
epsimso@trendline.co.il