
Concernant la question 50810, je me permet de rectifier la réponse:
Etant baal koré depuis de nombreuses années, le sens des taamim m'a beaucoup intrigé. Leur fonction musicicale n'est que secondaire. Leur fonction première est la ponctuation du texte de la tora. Dans le monde sepharade, pendant des siècles entiers, la première chose que l'on apprenait aux enfants avec la lecture de l'hebreu, étaient les taamim de façon à pouvoir interpréter notre texte sacré.
En français, nous avons relativement peu de signes de ponctuation: le point qui indique une longue pause, la virgule, le point virgule, et dans certaine mesure le trait d'ugnion.
En hébreu de la tora se sont les taamim. Ils sont regroupés en deux groupes: ceux qui indiquent une pause (comme une fin de passouk, un atnah ou un ravia par exemple), de longueur variable (il existe 4 degrés de pause) et ceux qui relient des mots (comme darga, ou encore shofar mehupakh). Et donc inverser des taamim peut avoir une inscidence catastrophique sur le sens de la phrase.
Chalom,
Merci de votre commentaire. Il est en grande partie correct, sous reserve des quelques precisions qui suivent, lesquelles me permettent egalement de completer ma reponse precedente.
La fonction des taamim est en realite triple : 1) Servir de signes de ponctuation musicaux pour la recitation lithurgique du texte de la Torah, 2) Indiquer la prononciation correcte des mots, en particulier quelle syllabe accentuer, et 3) Remplir une fonction grammaticale, c'est-a-dire d'indiquer a quels endroits couper une phrase, quels mots lire ensemble ou separes, etc.
C'est sur cette fonction de ponctuation que porte votre message, et vous avez parfaitement raison de la signaler. Il est exact que le sens de la phrase peut dependre de la ponctuation, et on en trouve des exemples dans la litterature rabbinique. C'est ainsi que le verset dans Chemot 24:5 peut etre lu de 2 manieres differentes, et que les taamim decident en faveur de l'une par rapport a l'autre (cf. egalement 'Hagigah 6b et Rachi sur place).
Mais cette fonction explicative des taamim trouve rapidement ses limites. Il est impossible, a ma connaissance, d'expliquer pourquoi tel signe de liaison, ou tel signe de separation, a ete employe plutot que tel autre. De plus, certains signes peuvent etre interchanges sans que le sens de la phrase soit modifie. Et le nombre de cas ou les taamim jouent un role explicatif n'est pas si grand que cela. Il serait, je crois, completement impossible de rediger un "commentaire de la Torah sur la base des taamim".
Chez les Richonim, on trouve quelques exemples d'utilisation des taamim dans les perouchim. En plus du Rachi cite dans ma precedente reponse, voyez entre autres le Rachbam sur Bereichit 49:9, ou ce qu'ecrit Abraham Ibn Ezra (Moznayim 4b). Mais le Radak, sur Hochea 12:12, exprime son desaccord et affirme dans le cas d'espece que la vraie explication du verset ne suit pas les taamim.
Il faut encore signaler que l'origine meme des taamim est sujette a controverses. Si certains la font remonter jusqu'au don de la Torah, d'autres pensent qu'elle est nettement plus tardive. C'est ainsi que selon Mar Netrounay Gaon, les taamim ont ete inventes par les Sages du Talmud.
Notre tradition des taamim n'est d'ailleurs pas la seule. D'autres ont existe dans l'histoire. On distingue en realite 3 traditions differentes, la tradition babylonienne, la tradition eretz-israelienne, et la tradition de Tiberiade (cette derniere, qui combine des elements des deux premieres, est la notre). Des temoignages historiques de l'existence des autres traditions de taamim nous sont parvenus, soit par des textes anciens comme le Ma'hzor Vitry, soit recemment dans les documents decouverts dans la Gueniza du Caire.
(Pour plus de renseignements, voir l'Encyclopedia Mikrait, volume 3, pages 394 ss)