Conversation 2562 - Les Ismaelites avant Ismael

Anonyme
Dimanche 24 novembre 2002 - 23:00

pourquoi Rashi explique que les anges qui sont venus voir avraham sont des ismaelim alors que ceux ci n'existaient pas encore puisque ismael est le fils d'abraham.

Rav Yitshak Chouraqui
Mercredi 4 décembre 2002 - 23:00

Tout d'abord, il convient d'être plus scrupuleux dans votre lecture de Rashi. Il écrit que les anges lui apparurent comme des "araviim", des arabes. Il est clair que la péninsule arabique était déjà habitée à cette époque par des peuples qui prennent le nom d'arabe, et de façon plus générale cela désigne les tribus nomades qui vivent dans le désert, la ''arava". L'origine de ce commentaire est le Talmud Baba Metsia 86b. Il existe cependant un lien avec Yishmael. Le Talmud poursuit en disant: puisque Abraham a soupconné les anges à tort d'être des idolâtres, son propre fils Yishmael est devenu idolâtre. D'où nous apprenons aussi que la croyance monothéiste des arabes n'est que l'évolution ultérieure de croyances païennes. Quant à cette pratique idolâtre de se prosterner à la poussière de ses pieds, détrompons nous elle n'a pas disparu. Les idolâtres de l'antiquité croyaient que le monde est composé de particules infimes appelés atomes (Epicure et les épicuriens, P.U.F. Paris 1961, pp 70-71), et qu'il convient à l'homme d'adorer l'ordre de la nature, seule force universelle. La poussière des pieds était pour les idolâtres de l'antiquité un rappel permanent de leur divinité. Aujourd'hui encore beaucoup vénèrent ce qui leur semble être la seule force universelle: la nature ou la science qui s'occupe encore (et à raison !) de particules élémentaires.
Chalom,
Itshak Chouraqui

Anonyme
Mercredi 4 décembre 2002 - 23:00

Sans vouloir contester les dires du rav Chouraqui, les "arabes" n'apparaissent qu'aux Vème siècle avant l'ère chrétienne. Ils ne font pas confondre les canaanéens, les assyriens, les ugarites et les moabites présents dans cette région à cette époque avec les phéniciens (pères de la langue arabe) qui n'apparaissent qu'au Vème siècle. Donc, en clair, on nomme arabes les peuples de langues paléo, médio et néophénicienne. Ce qui, à l'époque d'abraham est impossible dans le temps. D'autre part (et je m'excuse d'être aussi pointillieux) avraiim vient de l'araméen signifiant plus généralement les sémites. Dire maintenant qu'ils soient arabe c faire un grave anachronisme.

Désolé de devoir vous contesté rèbbè mais croyez bien qu'avec un cursus universitaire en histoire des civilisations sémitiques je pouvais pas m'empécher :p

Rav Yitshak Chouraqui
Jeudi 5 décembre 2002 - 23:00

Votre remarque est la preuve de votre incompréhension profonde de la Tora, du Talmud, et de Rashi. Vous appliquez les définitions modernes du terme arabe sur le texte talmudique, et par cela vous commettez un grave anachronisme. Il y a là une confusion entre appellation historique et appellation typologique (cf. Encycl. Hebr. vol. 27 p162-163).Vous ne vous souciez pas de savoir si ce que l'historien d'aujourd'hui appelle arabe est ce que le Talmud appelle de même, ni si les rabbins du Talmud veulent définir les peuples que rencontre Abraham d'un point de vue historique ou d'un point de vue moral. C'est pourquoi vous faites étalage de nomenclature totalement superflue à la compréhension du passage discuté.
(A propos, vos connaissances nécessitent une mise à jour: les "arabes" apparaissent déjà au 9ème siècle avant l'ère vulgaire dans une inscription évoquant un roi arabe, et nombre d'autres inscriptions assyriennes du 8ème siècle parlent des arabes pour désigner des tribus nomades habitant le désert, la "arava". cf. Encycl. Mikrait vol. 6, p345- 361, ainsi que: Encycl. Universalis vol.2, p. 222-223 l'article sur l'Arabie)
Pour comprendre les enseignements du Talmud, il convient de discerner la préoccupation fondamentale de nos Sages: entrevoir de facon profonde et riche en enseignements le texte biblique. Ainsi, dans le passage discuté, le Talmud nous transmet une vision originale des peuples avec lesquels Abraham est en contact, mais aussi de l'attitude d'Abraham à leur égard. C'est aussi le centre de ma réponse précédente. Si vous désirez élargir cet aspect méthodologique de première importance, je vous renvoie aux travaux du professeur Isaac Heinmann de Jérusalem, Darkhei Haaggada, Jérusalem, 1954, p 35-43, ainsi qu'à l'étude du professeur Moche David Herr, Actes du sixième Congrès Mondial des Etude Juives, Jérusalem, 1977, p129-142 et particulièrement p 137-139.

n.b. Les diplômes n'ont jamais été la preuve d'une grande finesse intellectuelle.
Vous ne détenez pas le monopole des cursus universitaires.
La première qualité pour comprendre la Tora est la modestie.

Chalom,
Itshak Chouraqui