Conversation 28780 - La fille de Jephté

limloud
Jeudi 2 février 2006 - 23:00

Bonsoir,

Comment lire l'histoire de la fille de Jephté rapportée dans le livre des Juges ? A t-elle vraiment été sacrfiée (tuée) par son père ? D. approuva-t-il cela ?

Par avance merci

Rav Elie Kahn z''l
Jeudi 9 février 2006 - 12:30

Chalom,

Deux lectures possibles;
Celle moins sympathique que vous évoquez.
Et la seconde qui estime qu'il n'y a pas eu sacrifice humain, mais qu'elle ne s'est pas mariée et n'a pas eu de descendance.

naomie5
Mercredi 9 juillet 2008 - 23:00

Bonjour,

En tout premier lieu j'espère que votre santé s'améliore.
Par rapport à votre réponse à la question 28780
Pourquoi D. n'a t-il pas donné de descendance à la fille de Jephté ?
Est-ce une conséquence de ses origines (petite fille de 'concubine' de Guilad)?
Cordial shalom

Jacques Kohn z''l
Jeudi 10 juillet 2008 - 09:47

Lorsque la fille de Jephté apprit le vœu fait par son père et l’intention de celui-ci de le réaliser, elle lui opposa, indique figurativement le Midrach Tan‘houma, Be‘houqothaï (parag. 5), les arguments suivants :

« Jacob a promis à Hachem de prélever la dîme de tout ce qu’Il lui donnerait (Berèchith 28, 22). Lui a-t-il sacrifié l’un de ses douze fils ?

‘Hanna a promis à Hachem, s’Il lui donnait un fils, de le Lui donner “tous les jours de sa vie” (I Samuel 1, 11). L’a-t-elle offert en sacrifice ? »

Alors, voyant qu’il ne l’écoutait pas, elle lui demanda un délai de grâce de deux mois pendant lequel elle « descendrait sur les montagnes et pleurerait sa virginité avec ses compagnes » (11, 37).

Jephté lui accorde le délai qu’elle a sollicité, mais ensuite, précise le texte (11, 39), « il accomplit à son égard le vœu qu’il avait formulé ».

Nos rabbins s’interrogent sur les raisons pour lesquelles il n’a pas cherché à se faire relever de son engagement. Cela lui aurait été d’autant plus facile que son contenu et les circonstances dans lesquelles il avait été émis auraient permis aisément son annulation.

En réalité, expliquent-ils, Jephté aurait pu se faire relever de son vœu par Pin‘has, le kohen gadol, mais il s’était dit : « Je suis le chef des enfants d’Israël ! Ce n’est pas à moi d’aller chez Pin‘has ! » Quant à celui-ci, il a fait le raisonnement inverse : « Ce n’est pas à moi, kohen gadol fils de kohen gadol, de me rendre chez ce rustre ! » Ayant été la cause des malheurs de la jeune fille, ils ont été punis l’un et l’autre : Pin‘has a perdu l’inspiration divine (roua‘h ha-qodèch). Quant à Jephté (voir plus loin), son corps a été dépecé et enterré dans plusieurs endroits (Midrach Qohéleth Rabba 10, 15).

En quoi a consisté l’exécution du vœu de Jephté ? Si la Guemara (Ta‘anith 4a), le Midrach Tan‘houma et Ramban inclinent pour une mise à mort effective de la jeune fille, les commentateurs classiques considèrent pour la plupart que son père lui a imposé un célibat ou une réclusion perpétuelles (voir Abarbanel, Metsoudath David et Radaq). Quatre fois par ans ses amies venaient lui rendre visite et s’efforçaient de la consoler de son état (11, 40 et commentaires). On notera, à ce sujet, que s’il s’était agi pour ces femmes de commémorer son décès, un seul jour par an aurait suffi, ainsi que stipulé par la Halakha pour les anniversaires de deuil.

On peut dire, en conclusion, que la réduction de la fille de Jephté à un état de virginité perpétuelle a été provoquée, non pas par quelque tare dans les origines de son père, mais par l’inconséquence de celui-ci, qui aurait pu se faire relever de son vœu, mais qui ne l’a pas fait.